Paloma Ya Ya, l'histoire d'une Française en Birmanie
Paloma Ya Ya, l'histoire d'une Française en Birmanie
Paloma Ya Ya, l'histoire d'une Française en Birmanie
Paloma Ya Ya, l'histoire d'une Française en Birmanie
Paloma Ya Ya, l'histoire d'une Française en Birmanie
Paloma Ya Ya, l'histoire d'une Française en Birmanie
Sandie est la fondatrice de Paloma Ya Ya, une marque de vêtements aux matières brutes, aux teintes naturelles, au style ethnique chic comme on dit.
On a papoté avec elle de son projet aussi élégant que slow, de l’industrie textile en Birmanie, et de la façon dont le pays façonne son travail.
Sandie Guitart est partie il y a quatre ans en Birmanie avec son compagnon. Là-bas elle a créé un circuit de production court auprès d’artisans ultra-doués qui lui permettent de concrétiser des vêtements d’excellente facture. À l’opposé des grosses usines des géants de la mode, elle collabore avec des personnes qui gagnent leur vie correctement, au savoir-faire qui la fascine toujours autant.
L’opportunité d’aller en vivre en Birmanie est venue par ton compagnon. Qu’avais-tu en tête au moment de t’y installer et qu’est-ce qui te donnait envie de partir ?
En réalité, je n’avais pas grand chose en tête. Je ne connaissais pas du tout l’Asie, je n’étais jamais allée en Birmanie ni dans les pays autour. Je me suis surtout dit que j’allais vivre grande une aventure. Je ne sais plus si j’avais déjà dans l’idée de me centrer sur l’artisanat, même si j’ai toujours aimé ça. Par ailleurs, je ne me rendais pas compte que le pays était aussi pauvre.
Ce qui est sûr, c’est que j’avais envie de partir. Je travaillais dans la mode à Paris. Je ne me retrouvais pas dans les façons de faire des gens, ni dans leur façon de consommer. Parfois on proposait des vêtements de très mauvaise qualité, soit disant parce que c’était ce que les clients voulaient. C’était un univers où il y avait beaucoup de copies, des grands créateurs qui copient les petits, des moyens qui copient les grands... De la fabrication lointaine, de la qualité moyenne. Je n’ai pas vraiment fait de plan de route en partant, mais je voulais me rapprocher d’une certaine authenticité et simplicité.
En quoi la culture birmane influence-t-elle ton travail ?
Ce qui m’inspire d’abord, c’est le travail réalisé à la main, les artisans birmans sont capables de réaliser des ouvrages incroyablement complexes, en terme de motifs, de couleurs...
Après, je me suis beaucoup adaptée à des façons de faire locales. Les artisans n’étant pas en mesure de produire de grandes quantités, je fais de petites productions. Ça va bien avec mon idée de ralentir. Dans les pays développés, le rythme est… je ne vais pas dire "ridicule" mais disons un peu trop soutenu. Autre élément : quand tu fabriques une pièce ici, en Birmanie, tu as rarement deux fois exactement la même chose. Le tissu n’est pas toujours le même. C’est la beauté de l’irrégularité du fait-main. Il faut être dans le juste milieu entre rejeter ce qui est un défaut et accepter un truc qui aura une nuance d’écart parce que le dernier bain de teinture a eu lieu dans des conditions différentes du premier. Il faut maîtriser l’irrégularité. Je m’en plains souvent mais je trouve ça charmant.
Globalement, on a ici une approche des choses plus simple. La bienveillance des personnes, ça change par rapport à Paris. (Elle rit) Je ne voudrais pas faire de raccourcis, mais parfois les raccourcis sont pertinents… : ici, tout le monde sourit, la lumière change la vie, tout est ultra lumineux, les couleurs sont très fortes… Le bruit aussi est très fort! Et les gens sont bouddhistes, ça ne veut pas dire qu’ils sont tous "peaceful", mais en face à face la politesse et le respect sont très importants.
« Je travaille qu'avec des artisans. Mais il y pas mal de grosses usines dans la banlieue de Rangoun, qui produisent pour de grandes enseignes, type H&M, C&A… »
Dans quel état est l’industrie textile en Birmanie ? Comment vivent les gens avec lesquels tu travailles ? (40 % des 51 millions de Birmans vivent au niveau ou en dessous du seuil de pauvreté, ndlr).
Je ne travaille pas avec des gens de l’ « industrie textile », mais avec des artisans. Il y a pas mal de grosses usines dans la banlieue de Rangoun, qui produisent pour de grandes enseignes, type H&M, C&A. Ce sont des usines de confection, le textile vient d’ailleurs, de Chine ou d'Inde. Les employés travaillent à la chaîne. Ces usines birmanes sont de plus en plus populaires : la main d’œuvre ne coûte pas cher et fournit un travail de premier ordre. Les gens sont logés et nourris par l’usine. Je ne sais pas si les conditions y sont particulièrement mauvaises. Le salaire journalier est de l’ordre de 3 000 ou 4 000 kyats, soit l’équivalent de 2€ (3000 kyats = 1,89€, ndlr). En ce qui concerne les petits ateliers de tissage manuel, les artisans gagnent chichement leur vie en général. A côté de cela, il existe des ateliers plus pointus, comme ceux avec lesquels je travaille, et qui fabriquent des textiles de qualité. Les artisans y gagnent correctement leur vie.
Peux-tu nous expliquer le parcours de production d’un de tes vêtements ?
Mes fournisseurs de tissu filent eux-mêmes le coton, généralement ce sont des ateliers familiaux. En l'occurrence, cette année, mon coton pousse dans leur village : il est cultivé, brossé, nettoyé, teint, filé au même endroit. Je développe les tissus main dans la main avec les ateliers et je fais moi même les contrôles qualité. J’élabore les patrons de tous les modèles de la marque. Ensuite interviennent les couturières. Elles coupent les tissus selon mes patrons et assemblent les vêtements.
L’étape teinture n’est–elle pas trop polluante ?
Les ateliers de tissage teignent le fil dans leur village, hors ici, il n’y a pas de retraitement des eaux, les bains sont rejetés directement dans le ruisseau derrière la maison. J’ai alors rapidement fait le choix des teintures naturelles afin de préserver les nappes phréatiques. Pour ma collection actuelle, la plupart des tissus sont écrus, c’est la couleur naturelle du coton. Donc sur certains produits, il n’y a pas d’utilisation de teinture du tout..
Tu avais fait une collection d’upcycling, tu n’as pas continué ?
J’avais chiné des vestes en jean à Paris que j’avais fait rebroder. En soi ce n’était pas super écolo, venant de France. Je n’ai pas recommencé parce qu’il n’y a pas grand chose à chiner ici, tout est utilisé et réutilisé, réparé, jusqu’à épuisement définitif.
Je suis tout le temps sur place. Je fais tout le contrôle qualité : celui des tissus, mètre par mètre, puis les vêtements, pièce par pièce.
Ton suivi de production est total ?
Je suis tout le temps sur place. Je fais tout le contrôle qualité : celui des tissus, mètre par mètre, puis les vêtements, pièce par pièce.. Je lance les productions, je suis sur place pour expliquer les finitions aux couturières. Ça prend énormément de temps. Mais c’est une façon d’être sûre que c’est bien fait.
Ta marque est-elle rentable ?
Ma ligne de vêtements commence tout juste à être rentable. Je réalise en parallèle des tissus d’aménagement d'intérieur ou des uniformes pour des hôtels et restaurants. Je ne le mets pas en avant sur le site parce que je le fais juste pour ici, pour des établissements éco-responsables pour qui il est important de se fournir localement.
Tu as pour projet de rendre Paloma Ya Ya disponible en boutique à Paris ?
J’aimerais bien être vendue dans une ou deux boutiques pour faire le relais par rapport à l’e-shop, pour que les gens puissent voir les vêtements. Mais pour moi ça reste plus simple de vendre localement et par internet.
Comment est-ce que tu te situes par rapport au mouvement Fashion Revolution ? Tu suis ce qui se passe ?
Oui, je suis pas mal ce qu’il se passe, tout ce mouvement de "moins mais mieux". Je pense que c’est ce genre de mouvements, avec des personnes un peu plus lucides que les autres, qui font avancer des choses. Pour moi leur message est évident, mais ça ne l’est pas pour tout le monde !
Retrouvez sur son e-shop la nouvelle collection de Paloma Ya Ya, des vêtements faits-main en Birmanie.
Cet article vous est proposé à l'initiative de Paloma Ya Ya.
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